Pourquoi?
Depuis l’automne 2022, je suis chargé de cours à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). C’est Patrick Giroux, professeur à l’UQAC et directeur de ma maitrise, qui m’a incité à soumettre ma candidature pour devenir chargé de cours. Lors de mon baccalauréat en enseignement secondaire, je trouvais que les chargés de cours apportaient une vision différente et plus concrète de celles des professeurs ayant un apport plus théorique. J’avais aussi remplacé Patrick à deux occasions pendant que j’étais à la maitrise et depuis ce temps, j’avais comme objectif d’avoir une charge de cours.
Quoi?
J’enseigne donc depuis deux ans (quatre sessions) les cours en technologies éducatives aux étudiants du baccalauréat en enseignement secondaire et aux étudiants du baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement primaire (3TLE221, 3TLE222, 3TLE223, 3TLE231 et 3TLE233). Ce sont des cours de 1 crédit, donc 5 séances de 3 heures, dispensés à travers la formation des futurs enseignants. Quand j’étais au bac, c’était un cours de 3 crédits (45 heures). L’université l’a divisé pour le répartir dans la formation initiale des enseignants. Jusqu’à présent, j’ai donné 7 cours à 10 groupes ce qui représente environ 250 étudiants de Chicoutimi et Sept-Îles.
Les cours en présentiel se donnent dans des classes actives. Il s’agit d’un environnement d’apprentissage optimal que les étudiants risquent peu de rencontrer durant leur carrière. L’UQAC a deux classes actives dans lesquelles 36 étudiants sont installés en ilots de 6 avec du mobilier modulaire comprenant des prises électriques. Ce mobilier peut être déplacé selon l’organisation du travail. Chaque ilot dispose également d’une surface numérique interactive (télévision) branchée à un ordinateur ou accessible en projection à partir des appareils des étudiants. La pédagogie est inévitablement différente avec un tel environnement, car les présentations orales peuvent se faire en petits groupes tandis que j’aime bien utiliser la formule du groupe d’experts pour qu’ils développent eux-mêmes certains éléments du cours. Les cours en ligne se font avec Zoom.
Comment?
Même si la session d’automne 2023 a été très exigeante, car j’avais accepté quatre charges de cours ce printemps avant de postuler pour un poste de direction au primaire que j’ai obtenu en juillet, il s’agit d’une expérience très stimulante. Certaines sessions impliquent quelques allers-retours au Saguenay pendant lesquels je m’absente de mon emploi ce qui augmente ma charge de travail. C’était plus facile quand j’étais direction adjointe au secondaire, car mes collègues pouvaient prendre le relai. En étant seul dans mon école, c’est différent. À chaque première séance, je dis aux étudiants d’être sévères dans l’évaluation du cours, car si ma présence ne convient pas, je vais tout simplement rester chez moi. Notre temps est précieux et les étudiants paient pour recevoir une formation de qualité. Si jamais ils sont insatisfaits, j’arrêterai tout simplement. Jusqu’à présent, les évaluations sont très positives. Mon parcours sur le terrain compte pour 80 % de la note selon moi. Les étudiants aiment les exemples concrets et souhaitent savoir comment ça se passe à l’école.
Mes impressions
Le principal défi est la planification des cours la première fois qu’on doit en donner un. À l’UQAC, les chargés de cours ont l’entière liberté de leur contenu. Il faut donc se baser sur les uniques deux paragraphes décrivant le cours sur le site de l’université (liens plus hauts) pour planifier les 15 heures de cours. C’est différent des 75 minutes que je devais planifier au secondaire ou des 60 minutes du primaire. Heureusement, j’ai pu compter sur certains plans de cours des professeurs titulaires, Patrick Giroux et Gabriel Dumouchel, mais ceux-ci ne dressent que les grandes lignes et je souhaite également apporter ma touche personnelle. Il faut donc lire entre les lignes et produire le contenu et les évaluations qui pourront répondre le plus aux objectifs du cours et à la réalité d’aujourd’hui sans sombrer dans l’évaluation nécessitant des heures de correction.
L’âge des étudiants est aussi un élément demandant une adaptation. Ce sont des adultes et non des ados. Ils se gèrent eux-mêmes. Si un étudiant magasine durant un de mes cours ou fait un travail pour un autre cours, c’est son problème. La plupart du temps, cet étudiant me réécrit la semaine, car il y a un élément d’un travail qu’il ne comprend pas. Il me fait un plaisir de lui rappeler qu’il n’écoutait pas durant la séance. J’exige aux étudiants qu’ils aient le même comportement qu’on exige des élèves auxquels ils enseigneront. Il m’est arrivé à une reprise d’arrêter un cours pour suggérer à un étudiant avec deux cannes de Redbull vides devant lui de sortir s’il n’était pas capable de se contrôler, car il dérangeait le groupe. Il est resté en silence la dernière heure.
Une autre différence est l’absence de matériel pédagogique. Il y a bien entendu les articles scientifiques ou quelques ouvrages de référence, mais il n’y a pas de matériel obligatoire comme c’est le cas pour certains cours de gestion de classe, de pédagogie ou disciplinaire. Il faut donc tout construire. Pour cela, j’avais l’habitude quand j’étais enseignant au secondaire de faire tout mon matériel, car j’avais des cours maison d’initiation à l’informatique (secondaire 1) ou d’éducation aux médias et à la citoyenneté, cours que j’avais monté de A à Z (secondaire 3). Heureusement, depuis 2009, le nombre de ressources pour développer la compétence numérique des élèves a littéralement explosé. Il s’agit de contenu très pertinent pour mes cours. Bref, j’en suis maintenant à donner des cours que j’ai déjà donnés. Je peux donc partir de ce que j’avais fait afin de le bonifier. Je dois encore peaufiner ma connaissance de la plateforme Moodle qui est quand même agréable à utiliser.
Le troisième point est l’absence de concertation entre les enseignants et les chargés de cours. Quand je vais sur le campus, je croise rarement des gens, que ce soit le personnel administratif, les chargés de cours et les autres professeurs. Soit ils enseignent ou ils sont en télétravail. Pour moi, qui suis présent au campus quelques jours par session, il m’est difficile de rencontrer les autres. J’ai bien voulu donner mon nom sur le comité pédagogique du module, mais toute la procédure syndicale pour aller chercher des appuis et soumettre une candidature m’a découragé. Enfin, les technologies ayant un caractère interdisciplinaire, il arrive que le contenu de mes cours soit abordé dans un autre cours, mais c’est souvent les étudiants eux-mêmes qui m’en informent. Un petit rajustement rapide est donc nécessaire pour éviter d’être redondant.
Le futur
Je serai inévitablement dépassé par les technologies. Quand cela arrivera, je laisserai ma place aux autres et proposerai mon nom pour d’autres cours et même dans d’autres universités. Actuellement, l’appropriation de mon nouveau rôle de directeur au primaire est déjà un défi en soi, je ne vois pas comment je pourrais prendre la charge d’un cours de 3 crédits s’échelonnant sur 15 semaines. Cependant, dans quelques années, cela serait possible. J’aimerais bien donner les cours relatifs à la gestion des comportements ou l’intégration des élèves EHDAA. À moyen terme, un cours au DESS en gestion scolaire m’intéresserait également. Cependant, je m’étais dit que ça prenait 10 ans d’enseignement pour devenir directeur. Je considère que ça prend 10 ans d’expérience comme direction pour enseigner aux futures directions. Il m’en reste donc 5 à faire.
Image : UQAC – service des communications de l’UQAC — service des communications de l’UQAC